Hatzfeld Prix Médicis

Le prix Médicis 2007 du roman a été attribué lundi, dès le premier tour, à Jean Hatzfeld pour La stratégie des antilopes, publié au Seuil. A 58 ans, Jean Hatzeld a couvert de nombreux conflits dans le monde pour le quotidien Libération auquel il a collaboré pendant près de 30 ans. La stratégie des antilopes est le 3e livre qu'il consacre au génocide de 1994 au Rwanda, au cours duquel 800.000 personnes ont été tuées en une centaine de jours. Un livre témoignage né de la décision en 2003 des autorités rwandaises de libérer après 7 ans de captivité 40.000 tueurs ayant participé aux massacres et de les renvoyer dans leurs villages où assassins et victimes vivent depuis côte à côte.

PARIS, 12 nov 2007 (AFP) - 12/11/2007 13h50 - Jean Hatzfeld, Prix Médicis 2007 pour "La stratégie des antilopes" (Le Seuil), a souligné l'importance du prix "pour faire comprendre (sa) démarche" qui consiste à "faire de la littérature avec un événement" comme le génocide au Rwanda.

"C'est formidable, pour le livre, pour les gens de là-bas. C'est un livre difficile, on pense que les jurés ne vont pas avoir le culot de le faire et ils l'ont fait", a-t-il affirmé après le vote du jury.

"C'est important pour faire comprendre ce que j'ai voulu faire, de la littérature avec un événement comme celui-ci. Faire entrer les gens par l'écrit dans un univers qui est celui du génocide", a-t-il souligné.

Jean Hatzfeld avait déjà obtenu le Prix Femina en 2003 avec "Une saison de machettes", premier volet de sa trilogie consacrée au Rwanda.

"Ma tentative a été de dire : on peut créer de vrais personnages de livres à partir de personnages réels, mais je ne suis pas le premier. C'est le récit, la question du personnage, la rencontre de l'écrivain avec ces gens là qui est primordiale", a-t-il souligné.

Jean Hatzfeld est le premier à franchir la porte-tambour de l’hôtel Crillon. Il faut dire que l’écrivain et ancien journaliste connaît bien les lieux. Il y a trois ans, il recevait, dans ce même palace parisien, le prix Fémina 2004 pour Une saison de machettes, premier volet de son triptyque consacré au génocide de 1994 au Rwanda et dont le troisième volume La stratégie des antilopes lui vaut de se voir remmettre, en ce 12 novembre, le prix Médicis. « Je suis à la fois très heureux et très surpris, commente le lauréat, car ce n’est pas un livre facile puisqu’il parle d’une réalité que personne ne veut voir en face. Sincèrement, ce deuxième prix après le Fémina, c’est étonnant d‘autant que je suis un auteur méconnu ». Si Jean Hatzfeld ne dédie pas cette récompense à ceux dont il a recueilli les témoignages – « Je n’écris pas pour eux, ça a toujours été clair, depuis le début », insiste-t-il -, il estime néanmoins que « cet événement leur permet de se dire qu’ils vont être mieux compris ». Interrogé sur la forme de son livre qui réunit, une fois de plus, des témoignages, l’ancien journaliste du quotidien Libération veut voir dans ce nouveau prix « la preuve que la frontière entre fiction et non fiction peut être déplacée et que l’on peut, en tout cas, créer de grands personnages de livres à partir de personnages du réel ». Y aura-t-il une suite ? Il n’en sait encore rien. Une seule certitude, il repart fin novembre au Rwanda.

Dès le premier tour, le jury du Médicis a choisi d'accorder six voix à La Stratégie des antilopes (Seuil) de l'ancien grand reporter à Libération, Jean Hatzfeld. Il l'a emporté sur Charles Dantzig, qui n'a eu que trois voix, pour Je m'appelle François (Grasset), roman inspiré par l'itinéraire véridique d'un arnaqueur dont les identités multiples et la mythomanie abusent les gens de la haute de Paris à Hollywood.

Les jurés du Médicis, réunis à l'Hôtel Crillon, couronnent, avec La Stratégie des antilopes, un livre important de cette rentrée et une démarche d'une grande humanité, qui, s'inspirant des témoignages de victimes et de bourreaux du génocide rwandais, scrute l'énigme des tueries massives du XXe siècle. Au-delà du cas africain, c'est une expérience humaine terrible que Jean Hatzfeld explore. Pour dire l'indicible, l'écrivain - dont c'est le troisième ouvrage consacré au Rwanda - s'est forgé, à l'écoute des témoins rwandais, une langue poétique, puissante, originale.