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 Rwanda : justice « réconciliatrice » ?

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ibukafrance
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Rwanda : justice « réconciliatrice » ? Empty
MessageSujet: Rwanda : justice « réconciliatrice » ?   Rwanda : justice « réconciliatrice » ? Icon_minitimeJeu 25 Mai - 10:17

Rwanda : justice « réconciliatrice » ? (L'Humanité 24/05/06)
Génocide . Après 1994, l’appareil judiciaire a été balayé. L’exigence de justice conditionne la reconstruction du pays. D’où l’appel à des traditions antérieures au système colonial.

Après un crime contre l’humanité, rendre justice est-il possible ? Douze ans après le génocide d’avril-juillet 1994, la vie politique et sociale du Rwanda demeure dominée par cette exigence, condition d’une reconstruction nationale à la recherche d’elle-même. Au lendemain de la défaite du régime ayant fait de la haine ethnique un principe de gouvernement, « le système judiciaire était quasiment anéanti, rapporte Frédéric Mutagwera, avocat à Kigali. Mais l’extermination de nombreux magistrats et employés administratifs, la fuite de la plupart des autres, souvent compromis dans les massacres, l’effondrement de l’appareil d’État... ne suffisent pas à expliquer la paralysie de la justice. Il faut y ajouter l’effrayante blessure morale causée à toute une nation. D’où une sorte de paralysie mentale devant des crimes tellement énormes - au sens étymologique du terme, tellement inouïs - que la référence à des situations passées, à une jurisprudence rwandaise, était impossible » (1)...

Cette sorte de tétanie judiciaire dura deux longues années, avant que le Rwanda se dote des moyens jugés susceptibles de la dépasser. D’abord par la loi organique du 30 août 1996 instaurant une structure apte au jugement des personnes impliquées dans le génocide. Ensuite par la loi organique du 26 janvier 2001 instituant les juridictions gacaca (prononcez gatchatcha), chargées de mettre en oeuvre une « justice participative » héritée des traditions antérieures à la colonisation (le terme gacaca désigne, en kinyarwanda, l’herbe sur laquelle les anciennes assemblées villageoises réglaient les différends locaux).

Le Rwanda se trouve confronté à une triple préoccupation : mettre fin à la culture d’impunité, en oeuvre dès les premiers massacres « ethniques » (ceux de 1959, alors que le colonialisme belge dominait le pays) ; établir la vérité sur ce qui s’est passé ; créer les conditions de la réconciliation du pays avec lui-même. D’où le caractère inévitablement contradictoire revêtu par « l’acte de juger » dans un tel contexte historique : concilier la condamnation des crimes contre l’humanité inscrite dans l’évolution du droit international et l’entreprise de reconstruction à laquelle un gouvernement installé après une période de violence extrême d’État se trouve confronté.

La législation adoptée distingue quatre catégories de coupables. La première regroupe les « planificateurs » du génocide, les auteurs de tortures sexuelles, les « tueurs de grand renom ». Les catégories 2 et 3, les exécutants du génocide, ceux qui ont suivi. La quatrième concerne les auteurs de délits contre les biens... Le système pénal mis en place réserve aux premiers ce que l’on peut appeler la justice classique, celle de conception occidentale, les autres inculpés devant répondre de leurs actes devant gacaca.

Le principe en est le suivant : tout désordre est considéré comme touchant la société et doit à ce titre être sanctionné, étant admis que le but de la règle de droit traditionnel est moins la répression du coupable que sa socialisation. Les juridictions gacaca sont chargées de punir les acteurs des massacres dans le cadre d’une sorte de composé inédit de tribunal et de « commission vérité réconciliation » à la sud-africaine. Ces juridictions font intervenir plus de 250 000 inyangamugayo (« personnes intègres ») élus par leurs communautés et organisés selon une pyramide calquée sur le découpage administratif du pays (cellule, secteur, district ou ville, province). Au coeur de ce système, la volonté de construire, entre démarche citoyenne et thérapie collective, « une justice punitive, mais aussi participative et réconciliatrice », selon le mot d’Aloïse Cyanzayire, présidente de la 6e chambre de la Cour suprême chargée du suivi de cette institution d’un nouveau genre.

Avec cette innovation inspirée de la tradition, le Rwanda, toujours dépourvu des moyens requis pour la mise en oeuvre d’une justice de type occidental, tentait de sortir de l’ornière provoquée par cette pénurie à la fois matérielle et humaine. Selon une démarche que le président Paul Kagame présente ainsi : « Ce fut une idée collective, qui a germé au sein de la direction du Front patriotique rwandais à l’issue d’une série de réunions élargies tenues à travers tout le pays, au cours de l’année 1997. Le thème en était à la fois simple et complexe : comment associer justice, pardon, réconciliation et reconstruction ? Le recours aux gacaca s’est peu à peu imposé de lui-même. Pourquoi chercher ailleurs ce que notre histoire propre avait façonné ? » (2).

(1) La Justice internationale face au drame rwandais, dirigé par Jean-François Dupaquier (Karthala, mars 1996).

(2) Voir Jeune Afrique

du 19 janvier 2006.

Jean Chatain
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